La Déesse des sables

Publié le par Aurélie Genêt

Voilà que j'omettais de vous annoncer la sortie en version numérique de l'une de mes nouvelles: La déesse des sables.

En attendant la sortie papier avec d’autres nouvelles.

Quatrième de couverture rédigé par l'éditeur:

Un prêtre aristocrate de l’empire guerrier soarte, briguant les plus hautes fonctions, commet un crime impardonnable. Il utilise sa magie pour venger sa sœur. La loi de son peuple est catégorique, elle le désigne comme un pécheur perdu à la cause. Pourtant, son cœur lui susurre le contraire. Il décide de laver sa faute dans le désert et part seul convertir de vieilles tribus, quitte à mourir en martyr.
Mais, loin de tout, très vite sa foi semble bâtie sur du sable... D’où lui viennent ses idées sur les anciennes croyances ? Il se sent épié ! Dans le désert immobile, quelque chose... ondule sous les dune
s.

La Déesse des sables

Sur l'idée de mon éditeur, j'écris donc des nouvelles qui tournent autour du monde de mon roman (Le Sang d'Aldésie, qu'il faudra que je vous présente ici un jour ou l'autre). Un exercice plaisant puisque tout le décor, l'ambiance, les mentalités, les histoires des peuples, sont déjà bien en place dans mon esprit.

Cependant, si lues avec le roman, elles enrichissent son univers, reprennent des lieux ou des personnages secondaires, elles sont aussi complètement indépendantes au niveau de l'intrigue et n'ont aucune incidence sur l'histoire du roman. Ainsi, chaque récit peut-être lu indépendamment.

Cette nouvelle-ci est sans doute la plus différente puisqu’elle ne se passe pas en Aldésie (une société miroir de notre France du XVIIe siècle), mais dans le peuple ennemi de celle-ci, l'Empire soarte, avec une ambiance donc moins réaliste sur le plan historique. Mon inspiration est ici plus métissée, puisque ce peuple pourrait être l'héritier direct des peuples antiques méditerranéens avec cependant des influences arabes (ne serait-ce que par la situation géographique) et ottomanes. Ci-dessous, une petite carte de mon « monde ».

La Déesse des sables

Et pour finir, un extrait de la nouvelle (nouvelle longue puisque comprenant plus de 100 000 caractères, soit plus de 50 pages). Le personnage central, Etei, est un prêtre d’Ardeo - le dieu des Soartes - obnubilé par sa foi et qui se veut pétri de certitudes, mais malgré lui en proie au doute.

[…]Il perçut les premières notes de musique alors que la lune se trouvait au plus haut dans le ciel étoilé. Cette fois, les sons résonnaient plus proche, il entendait distinctement la musique bien qu’il fût incapable d’identifier un instrument connu. Puis, il comprit que la mélopée se composait en bonne partie de voix. Il s’agissait d’un chant, mais si insolite qu’on avait peine à y reconnaître des accents humains. Le battement était plus fort lui aussi. Une sorte de tambour, sans doute. Il cognait avec régularité, si puissamment qu’il faisait vibrer la montagne comme s’il en eût été le cœur. Les lueurs revinrent, changeantes, mouvantes, agitées d’une vie propre, à environ mi-hauteur des monts. Elles formèrent un long serpent brillant qui descendit lentement vers le désert. L’air se chargea d’odeurs étranges, un mélange violent et fleuri, presque agressif. Etei, demeuré assis dans sa couverture, se redressa pour mieux voir. Les lumières étaient des flambeaux, à n’en pas douter. À présent qu’elles naissaient à proximité, il distinguait des silhouettes dans le halo rouge du feu. La musique et les chants augmentaient au rythme de plus en plus véloce du tambour. On devait les entendre à des lieues à la ronde, pensa le prêtre. Les inconnus atteignaient presque la fin de la zone rocheuse. Bientôt, les premiers d’entre eux poseraient le pied sur le sable et n’auraient plus que quelques pas à faire – dix coudées tout au plus – pour entrer dans la petite oasis. Dans la nuit, les flammes de leurs torches brillaient trop vivement pour identifier autre chose que des formes, mais Etei reconnaissait toutefois des hommes et des femmes. Cela le soulagea, car même s’il eût nié toute angoisse, il avait un instant craint qu’il se fût agi de démons venus l’entraîner dans une sarabande infernale. L’idée l’effleura qu’ils étaient peut-être les créatures fantastiques évoquées par les légendes ayant pris apparence humaine, mais il la chassa résolument : c’était blasphème que de prêter crédit à ces contes d’infidèles.

Il dégagea la lame de son épée, en regrettant de n’avoir pas emporté d’arc dans son périple. Il n’avait pas trouvé une seule arme dans le fortin déserté. Lui qui voulait en découdre avec des hérétiques, jamais la possibilité d’une telle opportunité n’avait seulement frôlé son esprit. Ces danses – il voyait les corps se tordre et s’agiter grotesquement – et ces chants étaient assurément le fait de païens primitifs. Dans l’Empire, ce genre de débordement était strictement prohibé et les jeux et les ris limités à de brèves occasions, encore qu’elles ne concernassent souvent que les enfants. Ardeo n’avait pas donné vie aux hommes pour qu’ils s’amusent, mais pour qu’ils louent son nom et servent sa grandeur. Il n’avait que faire des fêtes et autres frivolités. Un grand culte se devait d’être avant tout un culte digne et strict. Etei resserra la main sur le pommeau de l’épée, mâchoires contractées, chaque muscle tendu, prêt à bondir. Quand ils le verraient, ces sauvages se jetteraient sûrement sur lui, peut-être pour le dévorer. Il avait lu dans des récits de voyage que les peuplades barbares pratiquaient ce genre de cérémonial bestial. Qu’importait ! Qu’y avait-il de plus noble et beau que mourir pour Dieu et pour la civilisation que symbolisait l’Empire ? Il n’aurait pu trouver sacrifice plus estimable en Ariase et, alors qu’il s’appliquait à ralentir sa respiration pour contrôler le rythme de son cœur, il se félicitait d’être finalement venu en ce lieu désolé, s’efforçant d’ignorer cette petite part de lui-même qui osait, pernicieuse, lui souffler le contraire. […]

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